Compte-rendu du live d’une heure sur instagram sur le sujet de L’impact des traumas de l’enfance dans la parentalité (j’en ai long à dire ^^)
Billet 1/2
Je précise qu’il s’agit de mon témoignage, mon histoire, mes ressources personnelles, et que je ne suis pas (encore) professionnalisée dans l’accompagnement des victimes de trauma. Je trouvais cela intéressant de parler en tant que victime de ce que j’avais déployé pour tenter d’accompagner mes enfants au mieux aujourd’hui, ou moi-même.
Un trauma, c’est quoi ?
D’abord, entendons-nous direct sur ce sujet : un trauma, c’est un choc émotionnel très intense, où notre intégrité (physique, psychique) s’est vue mise en danger. C’est donc propre à chacun, il n’y a pas de hiérarchisation du trauma, tu peux avoir des séquelles d’une expérience douloureuse, traumatique, qui n’aurait pas eu du tout le même effet chez un autre être humain. Nous sommes tous différents et il n’y a pas des traumas moins légitimes que d’autres : tu en souffres, c’est un trauma !
ça t’appartient, c’est déjà pas simple, alors ne laisse personne te dire que t’exagères, que c’est rien etc : un trauma ne se compare pas, ne se rationnalise pas, ne se minimise pas, ne se solutionne pas par des conseils non sollicités.
Ici, nous nous attarderons sur des traumas d’enfance.
C’est le plus grand défi de ma vie de réussir à briser cette violence banalisée, à péter l’héritage transgénérationnel d’une lignée d’agresseurs et d’abuseurs en tout genre.
Au quotidien, ça m’impacte, mes traumas sont encore présents,et je suis très souvent en proie à mes démons au lieu d’être dans le présent avec mes enfants, et c’est souffrant.
J’incarne (comme je peux) une parentalité sacrée.
C’est-à-dire que j’ai à coeur d’accompagner mes enfants dans le respect le plus total, sans domination. C’est mon intention, mais je n’arrive pas toujours à tenir ma posture, à cause de mes traumas d’enfant blessée.
Quand tu as été dominée toute ta vie, c’est difficile de sortir de ce schéma en devenant parent.

Comme tu le sais peut-être, j’ai subi des agressions sexuelles, enfant, mais j’ai à coeur que tu comprennes que dans ce texte, dans ce live insta, et dans mon travail en général, je porte la voix des victimes de toutes formes de violences : les VEO (violences éducatives ordinaires), on a TOUS connu ça. Même pas forcément par un parent : par un prof, une nounou… Aucun de nous n’a pleinement grandi dans un respect absolu, et donc, nous sommes tous concernés. Ce que je veux dire, c’est que je n’ai pas envie que tu te dises « non mais toi t’as le droit de te positionner en victime vu ce que tu as subi », j’ai envie que tu entendes que je te crois, que tu as souffert (même si tu minimises ce qui t’est arrivé) et que je suis là avec toi. On va s’en sortir à force d’en parler, d’avancer ensemble, et de se soutenir.
C’est un peu l’intention du film que je réalise, qui cherche à t’embarquer vers des questionnement autour de l’accompagnement d’un enfant sans violence éducative ordinaire quand toi, t’es héritière(-héritier) de ça et que t’as pas les clés.
Un trauma, ça gâche ton quotidien.

Ma misophonie
Quand j’étais petite, je pensais que j’étais juste chiante. Cette pensée a largement été véhiculée par mes parents, qui ne supportaient pas ma sensibilité exacerbée. (ils ont fait au mieux hein)
De base, j’ai une forte sensibilité, sensorialité, ce qui est à la fois génial (un peu un super pouvoir) mais également m’encombre et me fait très vite saturer (aux sons, lumières, textures…) : Je suis hypersensible
Longtemps j’ai cru que c’était une « fatalité ». Mon hyperacousie était à la fois quasi handicapante, et un espèce d’atout puisque j’entends les fourmis bâiller. C’est pratique, de tout entendre. Je pensais que c’était physiologique, neurologique, et donc « impossible à apaiser ». D’ailleurs, jusqu’à peu, c’était « relou » mais pas « insupportablissime ». Notamment parce que je ne me permettais pas de m’exprimer à ce sujet : trop étouffée dans mon enfance, je niais complètement la souffrance que je vivais, et me poussais à me convaincre que j’en faisais trop. J’avais même la pensée : « Si tu en parles, ton époux t’aimera moins/il t’en voudra/il va partir » parce que c’est insupportable de vivre avec quelqu’un comme moi, j’vous assure.
Mais l’amour inconditionnel de mon mari m’a plutôt menée sur le chemin inverse : en me sentant en sécurité auprès de lui, je me suis permise de m’exprimer pleinement, c’est à la fois beau et perturbant car, du coup, c’est ma famille qui prend le plus cher….

Mes stratégies pour avancer avec ma misophonie
Les moments critiques chez moi sont les repas et les douches/bain
Pour des raisons absolument évidentes pour une victime d’agression sexuelle : bruits de bouche, de corps, corps nus… C’est vraiment pas facile d’être maman avec ces intrusions-là au quotidien.
1- J’ai acheté un casque anti-bruit et des bouchons d’oreille qui étouffent les sons
Les références sont les suivantes :
3M Peltor Optime III – Le casque est pour les petites têtes (mon mari ne peut pas le porter, par exemple)

Avantage : c’est visuel pour les enfants : casque = besoin de moins de bruit / de calme.
Inconvénient : ça compresse un peu, parfois je me cogne (dans mon fils quand je l’allaite, par exemple) et t’as l’air d’un télétubbie 😀
Surefire EP4- les bouchons anti-bruit (ouais, c’est pour les chasseurs…Moi je chasse mes névroses)

Avantage : discret, efficace, tu peux dormir avec
Inconvénient : au bout d’un certain temps, ça fait mal (en tout cas, à moi)
ça ne supprime pas le bruit, ça atténue. C’est moins fort, y’a moins de bruits parasites, etc. Un « must have »
Alors l’inconvénient de ces outils, c’est qu’on est vite « trop sensible » quand on ne les a pas, donc j’ai entamé un sevrage ^^ Avant c’était systématique, maintenant je les utilise avec parcimonie pour éviter de ne plus supporter la vie normale.
2- J’évite de manger avec mes enfants
Je n’arrive pas à être bien dans mon repas (et pour moi, les repas, c’est sacré, ça devrait être un moment de partage, d’exploration, de joie… ça ne devrait pas être associé à du stress et pour éviter ça pour moi et pour mes enfants, j’évite de manger en même temps. )
Soit je vais sortir le chien pendant qu’ils mangent et je les rejoins à leur dessert (avec mon casque ^^) pour intéragir avec eux
Soit je suis à table avec eux mais je ne mange pas (j’ai déjà mangé/je mange après) comme ça j’arrive à me focus sur leurs sons et je me rappelle mentalement ce qui se passe « C’est Loup qui mâche ses coquillettes/ C’est la fourchette de Chevreuil contre ses dents, tout va bien ». Ces phrases-là qui me rassurent (dans tous les cas de figure) je n’arrive pas à me les dire si je suis moi-même en train de faire quelque chose (et autant te dire, je fais toujours quelque chose, donc..) De l’importance de la pleine conscience.

Mes crises dépendent de mon état
La fatigue, l’état de nerf, le stress, l’anxiété… Va m’empêcher d’être à l’écoute de ma misophonie (lol). Quand je suis reposée, quand j’ai bien mangé, quand je suis joyeuse, enthousiaste.. J’arrive plus facilement à vivre ces moments-clés de nos journées. Je suis tellement fière de moi quand un repas se passe sans que je sente dans mon corps que je veux vomir/crier/taper ou mourir (ouais ouais, je suis super équilibrée), mais pourtant ça arrive, et de plus en plus souvent, j’accède à cet état de paix <3
Ce qui m’entraîne vers le point suivant…
3- Je prends soin de moi
Tout commence par prendre soin de soi. On est toujours sur la métaphore du masque à oxygène : Dans un avion en décompression, tu poses d’abord le masque à oxygène sur ton visage avant d’installer celui de ton enfant, car si tu n’as pas d’oxygène, et que tu veux mettre celui de ton enfant en priorité, tu peux tomber dans les pommes, et vous êtes perdants tous les deux. Là, c’est exactement le même principe : ça te semble important d’être bien avec tes enfants, et c’est normal. Mais si tu n’es pas bien toi-même, c’est extrêmement difficile de réussir à leur apporter cette sérénité et cette quiétude, cette stabilité dont ils ont besoin, aussi. D’où l’importance de commencer par soi-même (ou soi m’aime comme j’aime l’écrire)
J’avais vraiment cette notion du sacrifice où mes enfants passaient avant moi (ils ne peuvent pas différer, ils sont en construction, etc) et c’est pas faux, hein, mais je me suis perdue là-dedans, je prenais pas soin de moi, de mon âme, je foutais tout ça sous le tapis, et du coup j’étais vite sur les nerfs, fatiguée, et je me trouvais des excuses, je m’imposais des injonctions pour être à la hauteur pour eux. ça m’a menée au burn out, et aujourd’hui c’est encore plus difficile d’être bien, parce que je retombe très facilement, vu que je suis allée trop loin. Evitons-donc le burn out en étant sensible aux signaux, en s’écoutant en priorité et en prenant soin de soi !
Si c’est trop difficile, tu peux prendre soin de toi avec des pros ! Prendre soin de son mental (thérapeute, psy, coach…), physique (yoga, massages…) tu peux aller voir des arts-thérapeutes… Va te nourrir, te ressourcer… Parfois on doit sortir de sa zone de confort et aller dans l’action, juste pour accéder à cette urgence qui est le prendre soin de soi.
Parce que, si tu n’agis pas, de toute manière, ça te rattrapera.
Je ferai un « billet numéro 2 » pour la suite, car c’est déjà extrêmement long (en même temps, la vidéo sur insta dure 1h) mais ça fait déjà un bon ptit débrief.
N’hésite pas à témoigner, c’est important de déposer ton propre chemin, je pense que c’est essentiel pour que l’on se serre les coudes et qu’on ne se sente pas seul !
Bonjour Ariane ! Je viens de lire ton article et les larmes ont commencées à monter tellement ça résonne. Tellement ça me fait penser aux deux dernières années que je viens de vivre. À l’automne 2019, j’ai fait un burn out. Le mal-être couvait depuis un moment.
Et puis j’ai vite compris que des situations vécues au boulot faisaient résonance avec un trauma de jeune ado. Je ne pouvais plus repousser le fait d’entamer une thérapie, mon corps et ma tête ont dit stop, et m’ont obligé à consulter. J’ai compris que je vivais un syndrome de choc post traumatique, 20 ans après. Harcèlement scolaire: violences physiques et psychiques, certaines lourdes de sens au niveau symbolique. Se reconnaître victime. Puis haïr ce mot. Puis faire la paix avec lui.
Dans la phase aiguë du syndrome, je vivais des moments où j’entendais tout trop fort. J’ai toujours été très sensible aux bruits, mais là j’avais l’impression de devenir folle. Entre autres symptômes.
Ça fait du bien de lire une autre personne avec ce type de symptômes !
Aujourd’hui ça va mieux. Et oui, comme tu dis, il ne faut pas hésiter à se faire aider.
De mon côté, ce qui est marrant, c’est que j’ai toujours eu du mal à faire un choix quant au fait de vouloir faire un enfant ou pas. Je crois que je sentais inconsciemment que j’avais des choses à travailler avant de me décider. Et pendant cette année de convalescence, de travail sur moi, j’ai enfin pu faire un choix, et surtout mettre des mots dessus (à 35 ans !) . Oui, j’ai envie de découvrir cette aventure qu’est de faire un enfant. Même si je suis complètement consciente aujourd’hui de mes traumas (et encore, il y a encore pas mal de choses à creuser) et des difficultés que ça entraîne dans mon quotidien et dans mon rapport aux autres.
Voilà pour mon témoignage.
Merci beaucoup pour le tiens Ariane, c’est très courageux les partages que tu fais sur la toile !
Et bonne continuation sur le chemin de ta vie !
Je trouve ton témoignage magnifique et BRAVO.
Bravo pour ta force,
Bravo pour cette « conscience » intuitive qui te permettra d’entrer dans ta maternité de façon plus douce que si tu avais dû tout vivre en parallèle. C’est beau !
Je publie de ce pas le 2e volet de cet article !